I. Histoire
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II. Description de la citadelle | III. Notes et références | IV. Annexes |
3. Aujourd'hui
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La première mention du nom de Bitche se trouve dans une lettre datée du milieu de XIIe siècle et dans laquelle le duc de Lorraine Matthieu Ier demande au comte de Sarrewerden de respecter les limites ainsi que les habitants de sa seigneurie. Dans cette lettre écrite en lettres gothiques mais en latin, les limites de cette seigneurie sont parfaitement établies. Dès 1170, un Bitis Castrum apparaît dans un document où Frédéric Ier de Lorraine se dénomme lui-même Dominus de Bites, « seigneur de Bitche ». La tradition situe ce premier château de Bitche, ou Altbitsch, sur le Schlossberg au nord du village de Lemberg. Le château donnera son nom à la seigneurie puis à la ville de Bitche. Ce château semble plutôt être un pavillon de chasse situé dans la proche forêt de Lemberg. Il semble qu’à la même époque, sans qu'il soit possible cependant de dater précisément l'évênement, un autre pavillon est construit sur le Schlossberg, à l'emplacement de l'actuelle citadelle bitchoise. L'intérêt stratégique de ce promontoire avec vision panoramique sur plusieurs vallées alentours n'a pu échapper en effet aux seigneurs de l’époque. Le second château fort est donc sans doute construit à la fin du XIIIe siècle par le comte Eberhard de Zweibrücken, décédé en 1321, sur le rocher actuel de la ville de Bitche. Il est partiellement détruit au début du XVe siècle pendant la guerre des Paysans ou guerre des Rustauds, aussi appelée en allemand Bauernkrieg, qui sébit dans la région en 1525.
Jusqu’au début du XVIe siècle, la seigneurie de Bitche dépend en définitive de l'hégémonique Saint-Empire romain germanique. Lorsque le comte Reinhard de Zweibrücken-Bitche décède en 1531, ses deux fils se partagent son domaine. Mais bien vite, ils en viennent à se brouiller et se querellent violemment, si bien que le duc de Lorraine commence à avoir de sérieuses visées sur cette seigneurie. En fin de compte, Amélie de Bitche, fille de feu Simon Wecker et épouse de Philippe de Limange, vend la terre de la seigneurie bitchoise au duc de Lorraine Charles II (1390-1431), pour la somme de 50 000 écus. Il semble pourtant que les choses ne se passent pas très facilement et que la situation ne s'améliore pas puisqu'en 1563, le comte Jacques de Bitche rachète les maisons situées en bas du promontoire rocheux, les fait raser et ordonne la construiction de remparts afin de se protéger des ducs de Lorraine, auxquels il ne veut pas payer les aides. Le comte Jacques, qui règne depuis 1540, meurt en 1570, sans avoir laissé de descendants mâles directs ; il est ainsi le dernier comte de Bitche-Zweibrücken.
Il faut attendre la seconde partie du XVIIe siècle pour se faire une idée plus précise de ce à quoi pouvair ressembler le château et son site. Une vue cavalière, signée de la Poincte, fournit quelques détails intéressants. Cette vue ne correspond cependant pas tout à fait à la réalité, le dessinateur s'étant laissé librement emporter par son imagination. La surface du plateau, en réalité nettement plus étroite (sa longueur n'est que de 400 mètres et sa largeur moyenne de 33 mètres), est en effet augmentée exagérément. Cependant, cette représentation nous donne toutefois une idée en ce qui concerne la manière dont étaient répartis les différents bâtiments et le mur d'enceinte de la cité, comportant une série de tours de flanquement. En 1634, le cardinal Armand Jean du Plessis de Richelieu (1585-1642), pour punir le nouveau propriétaire, Charles IV de Lorraine, décide de le déposséder de ce qui lui reste encore. Le maréchal d'Humières est chargé de prendre le château de Bitche qui se rend après un siège de dix jours. Les Français s'installent dans le pays et les malheurs continuent. Lorsque Louis XIV s'empare de Bitche en 1680, le château des comtes de Deux-Ponts-Bitche, restauré à plusieurs reprises, est en ruine.
2. La guerre
de 1870
Partiellement détruite lors de l'avancée
prussienne et du long siège de place en 1870 et 1871, la
citadelle est par la suite modernisée par l'administration de l'empire allemand
durant les premières décennies de l'annexion, entre 1871 à 1900, puis à nouveau
endommagée en 1944 et 1945 par les bombardements de l'artillerie américaine. Les
faits les plus victorieux pour les défenseurs de la citadelle sont sans aucun
doute l'attaque de 1793, ainsi que la résistance au siège
de la guerre franco-allemande de 1870. La richesse patrimoniale et historique de
la citadelle ainsi que des souterrains leur ont permis d'être inscrits à
l'inventaire des monuments historiques depuis l'année
1979.
La citadelle de Bitche connaît un nouveau
grand jour dans son histoire le 23 mai 2006, lorsque trois nouvelles cloches
sont fondues à l'occasion de l'inauguration officielle du nouveau parcours de
visite de la forteresse bitchoise, en présence de plusieurs représentants politiques locaux. Christiane
Leroy, épouse du président du conseil régional de Lorraine, la marraine et
Gérard Mordillat, le réalisateur de la Forteresse assiégée, le parrain,
ont coulé avec les ouvriers de l'entreprise strasbourgeoise Vœgele, le mélange
de cuivre et d'étain. Le 25 mai 2006, les fondeurs ont cassé les gangues
d'argile et de crottin de cheval afin de révéler les trois nouvelles cloches. La
plus lourde d'entre elles, pesant soixante-trois kilos et frappée aux armoiries
de la ville et du commandant Louis-Casimir
Teyssier, sonnera à la volée tandis que les deux autres, pesant
respectivement quarante et vingt kilos, rejoindront l'unique cloche d'époque
pour sonner l'heure. Le carillon, quant à lui, ne fonctionnera qu'à partir
de l'année 2007, lors de la restauration de la chapelle de la
citadelle.
II. Description de la citadelle
Le nouveau château,
qui sera appelé plus tard la Citadelle, subsiste toujours à l'exception de la
plupart des bâtiments de surface. Il comprend alors un plateau central
bastionné, précédé à l'est par l'ouvrage de la Grosse-Tête et à l'ouest par
celui de la Petite-Tête. La partie la plus impressionnante est constituée par la
courtine sud. Il s'agit d'un bloc de rocher, mesurant près de 20 mètres de haut et
210 mètres de long, et formant un bouclier efficace contre n'importe quel
bombardement. En effet, des séries d'obstacles doivent empêcher l'ennemi de s'en
approcher : un fossé sec de 2,90 mètres de profondeur et 5,80 mètres de largeur,
un chemin couvert avec ses traverses, un glacis avec une pente de quarante-cinq degrés.
Afin de protéger cette longue courtine, on aménage
également deux bastions à ses extrémités.
Celui situé près de la Petite-Tête est
accolé au rocher et casematé. Par la suite est construit
sur le plateau inférieur, au milieu de la courtine, un bastion
bas relié au plateau supérieur par un escalier à
vis. Des poternes donnent accès au fossé, à partir
duquel des rampes permettent de transférer des
pièces d'artillerie de campagne, vers les places d'armes
aménagées sur le chemin couvert.
La courtine nord, qui est construite sur le même schéma
que son pendant sud, est pourtant bien moins spectaculaire. Davantage
exposé aux intempéries que la courtine sud, le rocher y
est protégé par un mur. Les éboulements montrent
fort bien à quel point cette exposition à la
pluie et au gel peut nuire à la solidité des
constructions, même fort robustes. Certes, on tentait à
l'époque par des saignées de canaliser les eaux de
suintement, mais on n'a jamais pu enrayer de façon
définitive l'action destructrice du gel lors des grands
froids qui assaillent encore aujourd'hui le pays durant de longues
semaines. Il est vrai que ces murs, qui ne sont que des murs de
pavement, même éboulés, ne diminuent en rien
la force défensive de la forteresse, tant l'épaisseur du
rocher est importante et paraît pouvoir résister à
toute tentative d'assaut. Les courtines courtes sont
protégées l'une par l'ouvrage de la Grosse-Tête,
l'autre par celui de la Petite-Tête. Deux ponts, qui
étaient à l'origine mobiles, communiquent à ces
deux ouvrages, qui sont séparés du reste de la forteresse
par de profondes gorges taillées dans le rocher. Sous chacun de
ces ponts, on peut encore appercevoir une caponnière, qui
assure la liaison souterraine entre les différents blocs rocheux
à l'abri de tout danger.
L'ouvrage de la Grosse-Tête,
particulièrement monumental, est chargée d'assurer la défense contre toute
approche du château pouvant intervenir du côté nord de la forteresse, ainsi
que la surveillance les routes venant de Wissembourg et de Pirmasens. Elle
comporte un ouvrage à corne, complété par un balcon, qui se situe en contrebas.
Un escalier à vis permet d'y accéder, ainsi qu'au petit ouvrage à corne du
plateau inférieur. L'ouvrage de la Petite-Tête est quant à lui d'une conception tout à fait
différente. Il s'agit d'une avancée du rocher en forme de demi-lune, dont l'angle arrondi est tourné vers
l'ennemi. Placé devant les bastions, elle permet de battre le terrain. Un
couronné, ensemble d'ouvrages de fortifications divers, reliés par des pas de
souris, l'entourait à l'origine.
Toutes ces entraves consécutives, ainsi que la très grande hauteur des remparts, empêchant ainsi toute escalade de la citadelle, expliquent pourquoi la forteresse de Bitche était considérée - et que l'histoire a révélée - comme imprenable. Le premier bâtiment que rencontre le visiteur arrivant sur le plateau de la citadelle est le corps de garde principal, érigé en 1743, qui abrite actuellement les services de billeterie du musée de la citadelle. Sa toiture est détruite lors des violents bombardements de la guerre franco-allemande 1870-71 et n'a pas été remplacée, tout comme les bâtiments se trouvant à proximité et que seules les levées de terre permettent encore à qui sait observer attentivement de localiser. Subsiste tout de même un certain nombre de bâtiments antérieurs à 1870. Le magasin à poudre constitue une construction massive aux murs épais et aux épais contreforts : il représentait en effet le point le plus sensible des bâtiments érigés sur le plateau, car il était très facilement explosif en cas de bombardement.
Du haut de ce belvédère, on peut remarquer que certaines collines qui environnent la ville de Bitche sont plus élevées que la forteresse. Ainsi, les hauteurs de la Rosselle, situées à l'ouest, se trouvent à une altitude supérieure de trente-sept mètres. Lors de la construction de la citadelle en 1740, cette position n'était aucunement handicapante, car l'artillerie n'avait à cette époque qu'une portée très limitée. Mais lors du conflit de 1870, cette dernière avait entretemps fait d'énormes progrès. Les tubes rayés et une plus grande puissance de la poudre augmentaient en effet la portée et la précision des tirs, de sorte que la forteresse de Bitche était pour les Bavarois, installés sur les hauteurs de la Rosselle, une cible idéale : c'est ainsi que les bâtiments ont été détruits dès les premiers bombardements et les mouvements de la garnison fortement contrecarrés lors du siège. Heureusement, les souterrains, dont la solidité était à toute épreuve, constituaient pour la garnison - et également pour les populations civiles quelques décennies plus tard - un abri protecteur et sûr pour se réfugier.